J’étais venue prendre mon billet la veille à la station de
bus. Mais c’était à un agent qui a pris comme commission 50 % du prix du
billet ! J’ai fait la comparaison dans le bus avec mon voisin, vite fait
de voir ça ! Mais cette entrée en matière m’a permis de faire la
connaissance d’un musicien de Jaisalmer, un manganyar, d’une lignée
traditionnelle de ces musiciens du désert qui connaissent aussi bien Bartabas
(qui les a fait jouer dans un de ses spectacles) que les hôtels 5* de Delhi ou
Bombay, Florence ou Vancouver. J’ai donc passé la première partie du trajet à
discuter avec lui et à regarder ses vidéos sur son téléphone, à me laisser
prendre en selfie avec lui tout en lui recommandant la discrétion sur sa page
Facebook !
« Prends un bus privé » m’avait conseillé mon amie
de Jodhpur, « ce sera plus confortable ! ».
Sauf que le dossier incliné à 120° ne peut pas se redresser.
Quel que soit le siège. Tous bloqués dans cette position où l’on est bien que
si on dort.
Sauf que seule la partie droite du bus a une rangée de deux
fauteuils et qu’avec le numéro 16 je me trouve dans le fond. Tout le reste du
bus est en couchettes. Soit à deux places au-dessus des sièges, soit à une
place pour la partie gauche. Et c’est là que ça s’entassent, au rez-de-chaussée
comme au premier 4 personnes par couchette. S’entassent donc le grand-père tout
de blanc vêtu, avec sa longue « kurta » (chemise) et tenant une
grande fourche en bois achetée probablement sur le marché, des jeunes couples
avec souvent une divine et belle femme rajpoute aux yeux rieurs, aux longs
cheveux noirs tressés bordés de bijoux traditionnels en or et pierres
précieuses, un bébé accroché au sein ou plus grand jouant avec sa natte, un
marchand musulman avec un calot de coton tricoté à fines côtes sur le crâne,
somnolent, un énorme sac d’oignons coincé entre ses pieds au milieu du couloir,
beaucoup de jeunes gens (étudiants ?), des hommes avec des boucles
d’oreille rajasthani traditionnelles, or et petits rubis, comme des fleurs s'épanouissant dans
les cheveux noirs.
Le couloir est plein, sur les couchettes du haut ce sont
plutôt des femmes, dont je ne distingue que les voiles orange, jaune ou
fuchsia, une au visage plus buriné et aux tongues usées en cuir de chameau.
Le bus s’arrête dans les villes principales, à Pokaran assez
suffisamment pour visiter les toilettes du café mais il faut faire vite pendant
que s’échangent à travers les vitres ouvertes roupies contre glaces ou cornets
de papier remplies de boulettes frites.
Alors quelle différence avec un bus local ? Déjà, il
n’y a personne sur le toit ! Et mon bagage a été fermé à clé dans la soute
en échange de 40 roupies ce qui me permet d’avoir l’esprit tranquille pendant
ces six heures de route. Le bus ne s’arrête pas dans les petits villages et le
reste du temps quand l’état de la route le permet, il fonce à toute allure et
le chauffeur se prend pour le Miles Davis du klaxon italien. On en prend plein
les oreilles même au fond du bus. Et pour le confort je suis vraiment plongée
dans l’action du roman que je lis, secouée comme un prunier dans une jeep du
siècle dernier à travers les fondrières
de la jungle birmane à la recherche des mines de rubis. Ca me permet de coller
à l’histoire facilement. Sauf que les animaux autour sont des éléphants alors
qu’ici ce sont des dromadaires. Mais on ne va pas chipoter pour quelques
trompes, les cahots eux restent les mêmes.
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