Aujourd’hui, J. a prévu que je parte avec son fils pour voir
la grand-mère et surtout donner mon avis sur une future guest-house. (Mais
qu’est-ce qu’ils ont tous à vouloir construire des guest-houses ?). Le
départ est prévu ce matin à 9 heures. Ce qui signifie qu’après avoir pris deux
toasts, un grand thé vert à 9 h j’ai encore le temps d’aller faire la lessive,
lire 53 mails sur mon ordinateur (merci la clé 4G). A 11 h on m’appelle, mais
pour prendre le petit déjeuner et je reprends une crêpe à la pomme de terre
avec du yaourt.
A midi, J. me dit que
finalement nous partirons tous ensemble chez la grand-mère. Parfait. On va y aller. J’ai
donc encore le temps de passer aux toilettes, me laver les dents et d’éplucher
deux kilos de petits pois qu’on va emmener.
Je commence à me faire à leur rythme indien. Je sais
maintenant que lorsque J. me dit d’un air agité, « on part, tu es
prête ? » cela sous-entend : « dans deux heures ».
J’ai tout compris.
La mère de J. et de G. habite tout près à quelques
kilomètres de bien mauvaises pistes avec des passages en sable, un
brise-vitesse tellement haut qu’il faut appeler quelqu’un pour qu’il pioche la
butée et diminue la hauteur pour éviter que la voiture reste perchée.
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vue nord sur la ferme |
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vue Sud sur la ferme |
La propriété des parents de J. s’étend sur plus de sept
mille hectares de désert et sa mère veuve tient encore tout ça de main ferme.
Elle a encore quelques ouvriers agricoles de temps en temps mais dans les beaux
jours de la propriété il y avait une équipe de quinze journaliers qui
travaillaient pour les légumes et les céréales. Seuls quelques hectares sont
fertiles grâce à l’irrigation.
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le cénotaphe du grand-père sur une colline au-dessus de la ferme |
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Je passe ma journée à vagabonder d’une collinette à l’autre.
J. m’avait fait envie en parlant de randonnée dans les montagnes mais nous n’avons
pas les mêmes références et je ne vois pas ce que des touristes pourraient bien
venir faire ici. Son frère qui nous a rejoint voudrait bien voir des touristes
profiter du silence et de la solitude des lieux. Mais j’essaie de lui faire
comprendre que nous avons plus près, moins cher, comme le Maroc pour avoir les
mêmes choses. Nul besoin de venir se perdre au milieu du désert du Rajasthan.
Il me parle alors de projets de loisirs pour occuper les gens comme… faire de
la moto sur les collines. Ben oui, pourquoi pas rajouter de la pollution et du
bruit dans ce paysage trop tranquille ? Je lui démolis ça tout de suite,
pas question, et pourquoi pas un parc d’attractions ?
Je pense que j’y suis allée un peu fort dans la démolition
de leur projet de guest-house, à croire qu’il n’y a que ça à faire pour placer
son argent et surtout en perdre.
Je passe mon après-midi sur les chemins déserts à profiter
du silence sublime.
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le bonheur... perchée sur ma colline ! |
Au soleil couchant, rencontre avec les petits gardiens de
chèvres qui travaillent aussi sur la propriété.
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les adorables petits chevreaux |
Puis le mari de G. arrive avec sa jeep militaire et les
alcools.
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la jeep |
Soirée feu de bois sous la nuit étoilée, le cuisinier fait cuire le
lapin dans le chaudron. Les hommes partent en jeep, fusil à l’avant pour tirer
quelques lapins, et reviennent bredouilles après avoir rencontré un sanglier.
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le lapin est en train de mijoter sur le feu de bois, les hommes mangent dehors. |
Les hommes restent dehors, sous les étoiles, à manger leur lapin, bien arrosé
de whisky. Au moins il n'y a pas de femmes qui leur disent : "arrête de boire autant" !
Les femmes mangent végétarien (et sans alcool) à l’intérieur de la cuisine,
la grand-mère aplatit les chapatis avec dextérité, art et conscience et les fait
cuire au feu de bois ce qui leur donne un goût inégalable. H1 en mangera
tellement qu’il en finira quasi malade.
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le repas en famille et entre femmes |
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la préparation des chapatis au feu de bois, un régal ! |
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on va pouvoir bientôt manger... |
On se croirait dans une réunion de bonnes copines, c’est
sympa, chaleureux, de partager ce bon repas ensemble.
Dans cette famille, on peut manger de la viande, mais jamais
à l’intérieur de la maison, ni y faire la vaisselle de plats ayant contenu de
la viande. Pas d’ostracisme mais pas de pollution.
A la fin de la soirée, J. décide de rester coucher chez sa
mère et garde la voiture. Nous rentrons tous en jeep, dans une nuit piquetée
d’étoiles avec un chauffeur fou et bourré. Nous sommes tous cramponnés les uns
aux autres et moi à la roue de secours en plus et nous avons droit à un gymkhana
délirant à travers les raccourcis sablonneux de la propriété et les épineux qui
nous font baisser la tête. Je me suis souvenue en souriant des tours de
chenille de la vogue lyonnaise que j’allais faire en cachette en sortant du
lycée quand la vogue était encore sur le cours de Verdun.
Nous arrivons enfin à la guest-house, l’estomac un peu à la renverse et
le chauffeur en rage car ses deux cuisiniers sont partis boire et ne sont pas
rentrés. Lui, il boit, mais il rentre…
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